Bioéthique – une nouvelle ligne rouge franchie : la possibilité pour les centres à but lucratif, certes à titre dérogatoire, de gérer les gamètes auto-conservés sans raison médicale
Je suis intervenu – en vain – pour convaincre la majorité de ne pas ouvrir aux centres à but lucratif la possibilité, même à titre dérogatoire, de gérer les gamètes auto-conservés sans raison médicale (article 2 du projet de loi).
Il faut bien distinguer la collecte, qui pourrait reposer sur des centres privés, et la distribution, qui doit être placée sous la responsabilité d’un organisme dépourvu de lien financier avec le couple de receveurs.
L’exclusion du secteur privé à but lucratif ne concerne pas seulement les embryons et les gamètes. Il ne faut pas ouvrir cette brèche : à terme, l’autorisation pourrait être étendue à tous les autres éléments et produits du corps humain, ce qui serait très dangereux.
Il s’agit d’une activité très spécialisée et sensible. Il n’est pas nécessaire, alors que de nombreux centres existent déjà, de la confier à des centres privés.
La notion de carence, évoquée par le rapporteur, me semble bien imprécise, d’autant plus que le ressort des ARS, chargées de constater les carences, s’étend désormais à des régions de taille XXL, imaginées par vos amis socialistes sous le précédent quinquennat. Tout cela pourrait conduire à des dérives marchandes. C’est pourquoi je m’y suis opposé.
Les centres privés effectuent déjà la conservation de gamètes, en cas de PMA, au sein du couple. Le cas visé par l’amendement est différent : il s’agit d’une autoconservation de précaution, sans raison médicale. Si les centres privés sont autorisés à effectuer une telle opération, l’incitation à y recourir n’en sera que plus forte – ne soyons pas dupes.
La conservation de gamètes, surtout dans un contexte de pénurie, ne peut pas être opérée par des centres à but lucratif.
« Nos lois de bioéthique disposent que les organismes à but non lucratif ont le monopole de la collecte, de la conservation et de l’attribution des éléments du corps humain – sans quoi nous ouvririons la voie, à l’avenir, à des demandes portant sur d’autres types de tissus ou d’éléments du corps humain, avec les dérives incitatives que chacun connaît.
En adoptant cet amendement, vous franchiriez à nouveau une ligne rouge vers la marchandisation du corps humain. Or, en matière de bioéthique, on l’a vu : les dérogations sont des portes ouvertes vers la généralisation.
Mme Buzyn s’y était opposée, évoquant même la nécessité d’instaurer des garde-fous. Là encore, vous prenez le risque d’empirer le projet. »