Dernière lecture de la proposition de loi visant au maintien provisoire du plafonnement de revalorisation de la variation annuelle des indices locatifs – séance du 28 juin 2023
Retrouvez ci-dessous la vidéo de mon intervention à la tribune de l’hémicycle lors de la discussion générale de la dernière lecture de la proposition de loi visant au maintien provisoire du plafonnement de revalorisation de la variation annuelle des indices locatif le mercredi 28 juin 2023 :
« Merci Madame la Présidente,
Madame la Ministre,
Monsieur le Président de la commission des affaires économiques,
Monsieur le Rapporteur,
Mes chers collègues,
Nous examinons en dernière lecture la proposition de loi visant à maintenir, pendant une année supplémentaire, le plafonnement de la revalorisation annuelle des indices locatifs.
Face à une inflation persistante, nous partageons l’idée que les familles et les commerçants doivent être protégés et accompagnés.
Les députés Les Républicains soutiendront donc ces mesures pour protéger les locataires face à l’inflation en la votant.
Pour autant, nous regrettons la méthode.
Manque d’anticipation du gouvernement, manque de concertation approfondie avec les acteurs, manque d’une évaluation sérieuse puisque notre Parlement est privé d’une étude d’impact.
Comme l’a dit la présidente de la commission des affaires économiques du Sénat Sophie Primas, « vous nous demandez de voter non seulement à la sauvette, mais aussi à l’aveuglette ».
Nous regrettons surtout qu’il n’y ait pas eu de recherche et de mise en œuvre par le gouvernement de mesures d’accompagnement des bailleurs, bailleurs publics comme privés, pour bâtir le dispositif le plus équilibré possible afin d’accompagner également les bailleurs face à l’inflation et relever le défi de la transition énergétique.
Il y a urgence à agir et il faudra d’autres mesures que celles prévues par cette proposition de loi.
En effet, le dispositif proposé n’est pas suffisant, il faut aussi accompagner les bailleurs face à l’inflation. Ils la subissent aussi. L’impact du plafonnement de la hausse de l’indice de révision des loyers pour les propriétaires a été évalué à un coût de 705 millions d’euros pour 2022. Cela réduit d’autant la capacité à réinvestir alors que c’est nécessaire.
Vous faites fi de l’inflation que subissent aussi de leur côté les bailleurs, bailleurs privés comme sociaux, petits ou gros. Loin des idées reçues, ces bailleurs peuvent aussi être des propriétaires modestes, qui mettent en location un bien durement acquis, et qui devront par ailleurs faire face à de coûteux travaux énergétiques dans les prochaines années s’ils veulent maintenir ce bien dans le parc locatif. Ils ont parfois contracté des emprunts. Le coût de la dette comme des travaux augmente. Il en va de même pour les taxes foncières. Nous ne pouvons pas le nier.
Car, au moment où notre pays est confronté à une crise du logement qui se traduit par une demande croissante de logements, à la fois quantitative et qualitative, il faut avoir conscience que ce plafonnement, qui n’est ni plus ni moins qu’une perte de recettes potentielles pour les bailleurs, va les contraindre dans leurs capacités de construction et de rénovation. Par exemple, pour les bailleurs sociaux, l’évolution du taux de livret A de 0,5% à 3% représente un coût de 3,75 milliards d’euros qui ne sera pas suffisamment compensé par la hausse ainsi limitée des loyers et des APL, ce qui réduit d’autant leur capacité d’autofinancement. Ne risque-t-on pas de pousser les bailleurs à reporter des travaux, notamment énergétiques, qui permettraient de baisser les charges des locataires par la suite ? Attention donc à ne pas poursuivre des objectifs contradictoires ! Ne risque-t-on pas de décourager les investisseurs dans la pierre ? Alors que si on encourageait davantage la construction et la rénovation, on augmenterait l’offre de logements, ce qui diminuerait la pression immobilière au bénéfice des locataires.
Bien sûr l’accès au crédit joue également. Il dépend de la capacité financière des acteurs et des règles en vigueur qu’il conviendrait de modifier.
Mes chers collègues, nous avons besoin de nouveaux logements, nous avons besoin de logements mis à la location, nous avons besoin de logements rénovés. Et c’est aussi en soutenant les propriétaires qu’on soutient les locataires. Si on veut éviter une sortie massive de logements proposés à la location, si on veut éviter une baisse drastique des mises en chantier, il faut rapidement des mesures fortes.
Au-delà de cette question des effets non négligeables du plafonnement de la révision des indices locatifs pour les bailleurs actuels et futurs, je veux tirer ici la sonnette d’alarme.
Madame la Ministre, vos annonces à la suite du CNR logement ont profondément déçu les acteurs du secteur. Vous ne semblez pas avoir pris la mesure de la situation du logement en France. Le logement est en crise, et avec lui le bâtiment. Or vous connaissez l’adage « quand le bâtiment va, tout va ». Alors avec une crise de l’offre et une crise de la demande, nous allons au devant d’une crise majeure du logement avec près de 16 milliards d’activité en moins l’an prochain, et près de 130 000 suppressions d’emplois. La construction est en panne. L’investissement est quasiment à l’arrêt.
Il est urgent, Madame la Ministre, de prendre des mesures pour relancer la construction, inciter la vente de fonciers constructibles, stimuler l’investissement, re solvabiliser les candidats à l’accession à la propriété. Les acteurs du logement vous ont fait des propositions très concrètes.
Madame la Ministre, les dépenses de demain dans le logement sont des recettes dès le lendemain, des recettes sociales et fiscales pour les comptes publics, mais surtout ces investissements dans le logement amélioreront demain le pouvoir d’achat des locataires en diminuant leur facture énergétique.
Enfin et c’est bien là l’essentiel, ces investissements dans le logement sont indispensables pour répondre aux besoins croissants des Français. Il en va de leur bien-être, et nous sommes réunis ici pour porter cette aspiration, renforcée par la crise sanitaire puis la crise énergétique.
Mes chers collègues, mobilisons-nous par des mesures concrètes et efficaces dès cet été pour solvabiliser la demande, et générer davantage d’offre afin d’apporter des logements en nombre suffisant et de qualité aux Français.
Il en va de notre cohésion sociale. »