Tribune de Thibault BAZIN sur le logement
« Nous vivons une triple crise de l’immobilier : une crise de l’offre de logements, une crise de la demande de logements, et une crise de l’accès au logement ». C’est en ces termes que s’exprimait l’ex-ministre du Logement dans L’Express en novembre dernier.
Les raisons de cette crise sont connues.
Sur le plan conjoncturel, l’augmentation rapide des taux d’intérêt conduit à une dégradation rapide du pouvoir d’achat immobilier. Elle se conjugue avec des prix qui baissent peu, notamment dans le neuf, du fait d’une hausse du coût des matériaux, du niveau élevé des prix du foncier, ainsi que des surcoûts liés à l’instauration incessante de nouvelles normes.
À cette crise de la demande, s’ajoute une crise de l’offre plus structurelle, due à la mise en œuvre de l’objectif zéro artificialisation nette (ZAN) dans les territoires et à la densification moins bien acceptée dans les centres urbains.
Or, cet affaissement du marché de la vente, notamment pour le neuf, a des conséquences en cascade sur le marché de la location. Nos étudiants et nos jeunes actifs ne trouvent plus d’appartements à louer. Les files d’attente pour obtenir un logement social ne cessent d’augmenter. Les propriétaires, inquiets face au risque de ne plus pouvoir louer leur logement en raison du calendrier de mise en œuvre des critères de décence énergétique, sont de plus en plus nombreux à jeter l’éponge.
Face à ce constat, les principales mesures du Gouvernement sont incompréhensibles.
Comment comprendre l’extinction programmée du dispositif Pinel, accusé de tous les maux, alors que la crise du neuf s’explique pour une majeure partie par la disparition des investisseurs particuliers ?
Comment comprendre le recentrage du prêt à taux zéro (PTZ) et la fin de l’éligibilité des maisons individuelles pour le neuf qui excluront des centaines de milliers de ménages dans les zones rurales et périurbaines ?
Comment comprendre le refus de rétablir les aides personnelles au logement pour l’accession ?
Comment comprendre que le Gouvernement maintienne un calendrier d’application des critères de décence énergétique alors que les propriétaires sont dans l’impossibilité d’effectuer des travaux de rénovation ?
Pourtant, des solutions existent afin de ne pas voir s’effondrer tout un secteur et anéantir les espérances des Français en matière de logement.
En premier lieu, il nous faut faciliter les opérations de rénovation. Pour cela, il pourrait être envisagé :
- De suspendre le caractère d’indécence énergétique en cas d’adoption d’un plan pluriannuel de travaux (PPT) suffisamment performant par les copropriétés concernées ;
- De repousser à 2030 l’application du calendrier de rénovation énergétique ;
- D’instaurer un crédit d’impôt sur les dépenses de rénovation énergétique.
En deuxième lieu, il y a urgence à fluidifier le marché locatif. En ce sens, il semblerait utile :
- De revenir sur la loi de 1948 afin de restreindre le droit de maintien dans les lieux pour un loyer dérisoire ;
- D’harmoniser les règles de prolongation du bail en cas de mise en copropriété avec le droit commun.
En troisième lieu, nous devons faciliter la construction et l’achat de logements. En ce sens, il apparaîtrait souhaitable :
- D’instaurer un crédit d’impôt sur les annuités des emprunts immobiliers des logements neufs soumis à la réglementation environnementale 2020 (RE2020), afin de soutenir non seulement les contribuables, mais aussi les professionnels du logement ;
- De dézoner le PTZ et d’indexer ses paramètres ;
- De prolonger jusqu’en 2027 le dispositif Denormandie ;
- De généraliser l’expérimentation du « Pinel breton » ;
- De rétablir les taux du « Pinel » en vigueur jusqu’en 2022 ;
- De rétablir les APL accession.
Face à l’ampleur de la crise, n’ayons pas peur d’une « rénovation » radicale de la politique du logement.