Présidence du Comité Consultatif National d’Ethique : audition de Jean-François DELFRAISSY
Retrouvez ci-dessous la vidéo de mon intervention en commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale dans le cadre de l’Audition de M. Jean-François Delfraissy, dont le renouvellement aux fonctions de président du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et la santé est envisagé par M. le Président de la République :
« Merci Madame la Présidente. Monsieur DELFRAISSY,
Nous sommes réunis ce matin en commission des affaires sociales pour vous auditionner en vue de votre renouvellement envisagé par le Président de la République aux fonctions de président du Comité Consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et la santé.
Ces dernières années ont été intenses pour vous puisque vous avez présidé le conseil scientifique pendant la pandémie de la covid-19.
Dans quelle mesure cette double casquette a pu amenuir le caractère indépendant du comité consultatif national d’éthique ? Le président du comité consultatif national d’éthique a-t-il toujours été en phase avec le président du comité scientifique ? Dit autrement, les décisions préconisées par le conseil scientifique ont-elles toutes pleinement respectées l’éthique ? Par exemple, très concrètement, concernant les syndromes de glissement de nos aînés isolés et privés de visites trop longtemps pendant la crise sanitaire, avez-vous des regrets autres que ceux déjà exprimés il y a un an concernant l’absence de concertation avec les citoyens ?
Permettez-moi de vous citer « on aurait pu sur les écoles, sur les personnes âgées, s’appuyer sur l’avis des citoyens. Mais le politique n’a pas souhaité le faire au niveau national. »
Le CCNE est pourtant une autorité indépendante. Comment pouvez-vous l’incarner après avoir travaillé de manière aussi proche avec l’exécutif durant la crise sanitaire, au-delà de l’auto-saisine, pour vous prononcer en toute indépendance sur les questions éthiques posées par les projets portés par le chef de l’Etat ?
Le CCNE s’est ainsi parfois exprimé de manière variable dans le temps sur des sujets de société alors que dans certains cas les techniques à l’instar de l’AMP et les questions éthiques liées n’avaient pas évolué donnant parfois le sentiment de suivre la pensée politique majoritaire à géométrie variable plutôt que d’incarner une voix indépendante. Récemment, l’avis 139 a contredit l’avis 121, la question éthique n’ayant pas changé. Des positions divergentes s’expriment de manière croissante au sein du CCNE alors que les avis par le passé pouvaient sembler davantage consensuels. Dans un pays aussi fracturé, dans quelle mesure le CCNE pourrait à nouveau porter le souci d’une voix éthique française faisant primer la fraternité en se préoccupant en priorité de la vulnérabilité ? et quelle articulation avec les règles déontologiques auxquelles sont attachés les professionnels concernés ?
Enfin les avis du CCNE sont parfois médiatiquement résumés par une approche qui peut sembler incomplète faisant abstraction des conditions à remplir, des précautions à prendre en compte. Quelle responsabilité le CCNE peut porter dans la communication de ses propres avis afin que leur présentation extérieure leur soit bien conforme ?
Et dans un contexte de ressources budgétaires et humaines limitées, n’y-a-t’il pas un enjeu éthique d’allocation de ces ressources ? »